Nous avons déjà vu dans l'unité sur l'emploi des temps ce que l'on entendait par postériorité:
Définition : La postériorité, c'est le fait de replacer une action par rapport à une autre, de telle façon que l'action de référence, qui est décrite dans la principale, a lieu avant l'action exprimée dans la subordonnée, qui est donc, elle, postérieure à l'action de référence.
ex: La souris s'échappe avant que le chat ne l'attrape.
L'action de référence est l'action principale: « La souris s'échappe ». L'action subordonnée se replace par rapport à cette action. Comme nous avons ici affaire à une subordonnée postérieure, l'action de la principale doit avoir lieu avant celle de la subordonnée.
D'où le schéma:
Rappelons que, lorsque l'action de référence a lieu (la souris s'échappe), l'action postérieure (avant que le chat ne l'attrape) n'a pas encore eu lieu.
D'ailleurs, si la souris court assez vite, le chat ne l'attrapera pas.
Pour bien montrer que, vue de la principale, l'action de la subordonnée de temps n'aura peut-être même pas lieu, le Français met le verbe de cette subordonnée au subjonctif, mode de l'éventualité. Cela revient à dire que, lorsque la souris se sera échappée, nul ne peut dire si le chat va pouvoir l'attraper. Et même si cette action a eu lieu la semaine dernière, et même si le chat a, depuis, mangé la souris, il n'en demeure pas moins vrai que, au moment où l'action de référence a eu lieu, l'action postérieure était encore du domaine de l'éventualité. Ce qui est important, c'est que l'on replace le récit au moment où l'action de référence a lieu, d'où l'emploi du subjonctif.
Maintenant que le principe de la postériorité est clair, du moins, nous l'espérons, passons aux différents moyens d'exprimer cette idée de postériorité:
Les subordonnées de temps marquant la postériorité sont introduites par l'une des locutions conjonctives suivantes:
Conjonctions :
Cette locution conjonctive montre tout simplement que l'action de référence a lieu avant l'action de la subordonnée. Elle peut être suivie du "ne" explétif. (Vous pourrez, à ce sujet, vous reporter à l'unité sur la négation)
Notons que:
Dans le premier cas, on part sans attendre qu'il soit en vue, dans le deuxième cas, on part avant qu'il ne soit là. (on peut attendre qu'il soit en vue, par exemple, au pied du bâtiment). La différence n'est certes pas bien grande, mais elle peut être exprimée en cas de besoin.
Notons en outre que, il y a quelques dizaines d'années, on aurait dû employer un imparfait du subjonctif au cas où l'action de référence aurait été à un temps du passé, le plus-que-parfait étant alors réservé aux actions terminées, ou du moins à celle avant la fin desquelles l'action de référence doit avoir eu lieu.
Représentons la forme avant que par un schéma.
Ici, cette élève apprend vite sa leçon avant que le professeur n'arrive.
Comme la jeune-fille ne sait pas encore sa leçon, et que le professeur est très sévère, la jeune fille se met au travail.
Le professeur n'étant pas encore là, on ne peut pas être sûr de son arrivée. C'est pour cela que l'on emploie le subjonctif.
La locution conjonctive en attendant que exprime que l'action de référence a lieu avant que l'action postérieure n'ait lieu. Mais elle ajoute en plus l'idée que l'on remplit tout le temps de cette attente en faisant l'action de référence.
L'arrivée de Marie (si elle vient) mettra un terme à cette action de référence qui n'est qu'une action pour passer le temps.
Représentons l'emploi de en attendant que par un schéma.
Vous savez sûrement que les gorilles adorent les bananes.
Ce gorille-ci attend que le gardien lui apporte son fruit préféré.
Que fait-il donc, en attendant son repas?
Rien de bien intéressant: il "tue le temps" en allant et venant.
L'action importante, pour lui, c'est celle de la subordonnée, à savoir l'arrivée des bananes. C'est clair, non?
Reprécisons encore une fois, au risque de nous répéter, que l'action de référence doit obligatoirement remplir tout le temps jusqu'à ce que l'action subordonnée ait lieu.
Les germanophones emploient le même mot, "bis", pour traduire aussi bien en attendant que et jusqu'à ce que. Mais n'allez surtout pas croire que ces deux locutions ont la même signification! Ce n'est vraiment pas le cas, et il ne faudra surtout pas les confondre!
Paul attend Marie (et oui, encore une fois!). il est chez lui, occupé à écrire un programme d'ordinateur pour calculer le poids de la lune. Normalement, Marie ne devait pas venir, mais elle lui a téléphoné, il y a dix minutes:
"Mon chéri, je passe à 8 heures. Tu m'aimes?"
Paul a dit "oui", bien sûr. Puis, il a reposé le combiné, et il s'est écrié. "Zut, alors. Si elle vient, je ne vais pas pouvoir terminer ce programme. C'est bien ennuyeux!"
Autrement dit, Paul n'est pas très heureux qu'elle vienne aujourd'hui. Mais, pour ne pas perdre de temps, il se remet au travail: il travaillera jusqu'à ce qu'elle arrive.
La locution conjonctive jusqu'à ce que exprime donc que l'action de référence remplit elle aussi le temps jusqu'au début de l'action subordonnée postérieure, mais la différence est la suivante:
Le résultat est certes le même, mais l'intention de l'auteur est différente.
☞ Si vous dites à votre ami: « J'ai rangé mes timbres en attendant que tu viennes. » c'est le grand amour: vous avez rangé les timbres pour tuer le temps, dans l'attente de son arrivée.
☞ Mais si vous lui dites: « J'ai rangé mes timbres jusqu'à ce que tu viennes. », c'est soit l'amour froid, soit que vous voulez montrer que l’on vous a surprise en plein milieu d’une activité importante. A vous de savoir ce que vous voulez lui dire.
Les actions postérieures, exprimées, comme nous l'avons vu, au moyen du subjonctif, posent des problèmes au Français moyen, qui aimerait parfois exprimer l'action au passé ou au futur, alors que le subjonctif moderne ne dispose plus que de deux temps qui fonctionnent, à savoir le présent, et son antérieur, le passé. L'absence d'un futur met le Français quelquefois mal à l'aise.
Par exemple, je veux dire que j'attendrai, demain, mon amie, et que je m'occuperai en collant des photos dans mon album.
Je ne dirai pas, comme le disent certains:
car je sais fort bien qu'il faut employer le subjonctif. Je dirai donc:
Mais je serai alors obligé de renoncer à l'expression du futur. Ceux qui veulent absolument employer un futur auront recours à deux locutions conjonctives un peu compliquées, mais qui sont suivies de l'indicatif:
Ou bien, si je veux montrer que je sais m'occuper, ou bien que son arrivée n'est pas si importante pour moi:
Cette fois-ci, notre gorille a enfin ses bananes. Il va donc les manger, et cela constituera son activité essentielle.
L'action annoncée dans la subordonnée (le gardien va venir lui faire faire sa promenade) ne l'intéresse pas: lui, ce qui l'intéresse, ce sont ses bananes.
Le gardien va donc venir l'interrompre dans son activité essentielle. On peut parier que l'arrivée du gardien ne va pas soulever son enthousiasme!
Nous aimerions encore faire une remarque importante pour nos lectrices allemandes. J'attends l'arrivée d'un collègue pour 8 heures. Il est 3 heures.
Je pourrai dire:
Cela est possible, puisque je peux très bien travailler pendant 5 heures (mais oui!).
Mais je ne pourrai pas dire:
En effet, dans ce cas, il faut que j'occupe 5 heures à manger un yaourt, ce qui est très difficile, car si je veux parvenir à manger un yaourt pendant 5 heures, il faut que j'en mette très peu sur ma cuillère, et que je fasse durer le plaisir le plus longtemps possible. Et dans ce cas, en admettant que je ne m'endorme pas entre deux cuillères, je pourrai demander à figurer dans le livre des records. Il faut donc faire très attention, et employer avec jusqu'à ce que ou en attendant que seulement des actions de référence qui peuvent occuper tout le temps jusqu'au début de l'action postérieure!
Attention donc de ne rien écrire de ridicule.
Le module eGrammaire / Grammaire participative est en pleine révision.
++ © Christian Meunier ++